GM DON’T #2 : Jeter les Dés jusqu’à l’Échec

Suite des traductions d’articles de Justin Alexander, les « GM DON’T » : les trucs à éviter à tout prix par le MJ.


Je jouais à un jeu de science-fiction et mon hacker voulait mettre en place un interrupteur de type « homme-mort » sur le système de climatisation de la station spatiale : Quand les assaillants lanceraient leur assaut, j’actionnerais l’interrupteur. Le MJ me fit faire un jet pour mettre en place l’interrupteur… et ensuite un jet à chaque round pour le maintenir en position… et ensuite encore un jet pour le déclencher bien que je l’eus mis en place correctement.

Au final, vu le nombre sans fin de jets de dés, ce fut l’échec assuré.

Si on met de côté l’incompréhension fondamentale de ce que constitue un interrupteur « homme-mort », l’effet négatif de ce genre de pratique peut s’avérer assez lourd dans une session de JDR. En l’occurrence, le groupe s’est vite rendu compte qu’il ne devrait en aucun cas tenter de mettre sur pied un quelconque plan : Si nous nous contentions de simplement improviser quelque chose, ce serait résolu par un seul jet de dé et nous aurions une chance de réussir. Si au contraire nous essayions de monter un plan, cela se traduirait par de nombreux jets de dés jusqu’à ce que le plan échoue.

La solution à cela est plutôt simple : Prolongez les Effets. Faites faire au personnage un jet de compétence unique qui détermine l’ultime succès ou échec de leur entreprise.

Une autre solution est le jet de compétence complexe (faire plusieurs jets jusqu’à obtenir X succès). Ce dernier est une solution élégante dans les systèmes à base de pool de dés, et quand vous voulez que plusieurs tests soient effectués, c’est un système efficace pour permettre cela sans le tout-ou-rien d’un unique test ruinant la tentative dans son ensemble.

GM DON’T #2.1 : L’ÉCHEC NE SERT À RIEN

Le pendant du « jeter les dés jusqu’à l’échec » est le « jeter les dés pour rien jusqu’à la réussite ». Par exemple, il arrivera souvent en jeu des situations où les PJ doivent déverrouiller une porte : il n’y a aucune urgence temporelle et aucune conséquence en cas d’échec, et pourtant le MJ va rester là à demander des jets aux joueurs jusqu’à ce qu’ils finissent par réussir.

Une façon de palier à ça est la mécanique Take 20 : si vous pouvez tôt ou tard  réussir quelque chose, alors on peut supposer que vous allez finir par y arriver et on peut continuer à avancer. Prolonger les effets peut aussi résoudre ce problème en apportant un dénouement opposé : Ton échec au jet de crochetage nous dit que tu n’es tout simplement pas assez doué pour crocheter cette serrure à ce moment et de cette façon. (L’unique test détermine ton rapport vis-à-vis de la serrure et tant que la situation n’aura pas changé de manière conséquente, ton personnage sera bloqué par cette serrure).

GM DON’T #2.2 : TROP DE JETS DE FOUILLE

Un peu dans le même ordre d’idées, le cas où une résolution d’action en plusieurs étapes donne lieu à de trop nombreuses étapes. Ça peut prendre plusieurs formes, mais la forme la plus cancérigène que j’ai pu observer venait de MJ qui prenaient les conseils pour la Fouille dans D&D 3eme Édition trop à la lettre. Ces conseils précisaient qu’il fallait un round pour fouiller 1 mètre carré. Ceci est utile pour le combat (où on pourrait se demander quelle surface on peut fouiller en un round), mais certains MJ l’ont pris au pied de la lettre et exigent un jet de Fouille pour chaque mètre carré. Donc si vous voulez fouiller un couloir qui fait 2 mètres de large sur 12 mètres de long, vous devrez faire 24 (!) jets de Fouille distincts.

Ceci n’est pas comme jeter les dès jusqu’à l’échec, puisque chaque carré est légitimement une tâche en soit. (Rater un jet pour le carré #1 ne veut pas dire que vous n’allez rien trouver dans le carré #2.) Mais ça tue le rythme – ce qui est soit indésirable en tant que tel, ou indésirable parce ça décourage les joueurs d’utiliser les compétences concernées par ce problème.

La solution dans ce cas est de grouper les jets intelligemment : Fouiller une pièce entière (ou même un ensemble de pièces) parait évident. Autrement, s’ils veulent fouiller les couloirs du donjon au fur-et-à-mesure qu’ils avancent, Prolongez les effets du jet de dés jusqu’à ce que soit il fassent un choix significatif autre que fouiller le couloir SOIT jusqu’à ce que ce jet produise un résultat (succès ou échec) qu’ils puissent reconnaître comme tel (i.e., jusqu’à ce que la fouille révèle un piège ou un passage secret en cas de réussite, ou jusqu’à ce qu’il rate et que le piège se déclenche ou qu’ils soient pris en embuscade par la porte secrète qu’ils ont manqué).

Parfois vous vous retrouverez avec un joueur qui demande à faire plusieurs jets de dés. Dans certains cas c’est parce que, eux aussi, ils suivent une mauvaise mécanique (comme faire un jet pour chaque mètre carré). Dans d’autres cas, c’est une manipulation de l’information méta-jeu (« je sais que j’ai fait un mauvais jet, donc attribuons-le à cette région spécifique et faisons un autre jet »). Souvent c’est parce qu’ils essayent de gérer le risque de manière irrationnelle (« je vais seulement chercher dans cette petite région, comme ça si je fais un mauvais jet les effets seront minimisés » — ce qui est idiot puisque vos chances de tomber sur un danger donné restent les mêmes, mais les gens le font quand même).

La plupart du temps votre réponse à ceci est plutôt simple : Vous leur dites non.

L’exception serait le cas rare où allonger la mécanique de résolution améliore le rendu rythmique. Comme les passages au ralenti dans un film, ce sont ces moments où mettre en valeur chaque instant, chaque petit détail rempli de tension, permet de faire monter les enchères et tenir la table en haleine.

Repérer ces moments se fait avec les tripes, pas le cerveau. Par exemple, j’allais dire qu’il ne faudrait jamais faire de jet de Fouille dans les couloirs de donjons… mais je me rends compte qu’une fois, j’ai suivi l’initiative d’un joueur qui tenait à faire un jet de dés pour chaque centimètre carré d’un couloir dans Tomb of Horrors, parce que dans ce cas, la mécanique collait parfaitement avec la paranoïa et la terreur ressenties par le groupe à ce moment.

FAITES DURER LE PLAISIR

Pour finir, disons clairement que déterminer qualitativement la réussite d’une action autre que succès/échec en jetant les dés de manière séquentielle ne veut pas forcément dire « jeter les dés jusqu’à l’échec ». Nous avons discuté de situations où chaque jet pris séparément constitue un accomplissement significatif en soi. Mais il est aussi vrai que, par exemple le combat, n’est pas « jeter les dés jusqu’à l’échec », bien qu’il mette en jeu une multitude de jets culminant en une seule issue, la vie ou la mort.

Il est également utile de remarquer que jeter les dés jusqu’à l’échec peut être un choix judicieux dans une situation où l’échec est assuré et que la question intéressante est de savoir combien de temps le personnage va pouvoir tenir avant d’échouer. Par exemple, combien de temps avant de perdre conscience dans le vide ? Combien de temps tiendrez-vous la porte que les loup-garous tentent de défoncer ?

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